On entend parfois : « On peut refaire une appli de gestion complète en no-code, pas besoin d’ERP. »
Séduisant… mais peu réaliste pour le cœur du métier. Le no-code a sa zone d’excellence ; l’ERP aussi. Le vrai sujet n’est pas de choisir un camp, mais d’assembler au bon endroit — avec une architecture claire, durable, et lisible par les équipes.
No-code : utile, modulaire, jamais monolithique
Par définition, le no-code permet de concevoir des applications et des automatisations sans écrire de code, via des interfaces visuelles. Résultat : on va très vite pour créer des interfaces, paramétrer des formulaires, lancer des automatisations et bâtir de petites applications internes ; on décrit les flux, on versionne les schémas et on surveille leur exécution. Autrement dit : mise en œuvre rapide et maintenance souple.
Le piège, c’est d’en faire un bloc unique qui porterait tout le métier. Un no-code durable doit rester modulaire (en briques) et connecté : des modules qui orchestrent des appels d’API et des notifications d’événements (webhooks), reliés au système de référence et aux outils spécialisés — c’est l’esprit des architectures dites composables.
Ce que l’ERP apporte au cœur du SI
Un ERP porte le transactionnel exigeant : tarification, ventes, achats, stocks, facturation, comptabilité — en parallèle et en temps réel. Pour tenir ces enchaînements sans décalage, il faut un moteur transactionnel avec propriétés ACID (atomicité, cohérence, isolation, durabilité), indexation, verrouillage des accès, tâches de fond, traitements planifiés et idempotence (rejouer un flux sans créer de doublon). C’est ce qui garantit la cohérence des chiffres et une source unique de vérité (SSOT) au niveau de l’entreprise.
En clair : l’ERP fait foi pour les objets critiques (clients, produits, commandes, prix, stocks, factures). Autour, on branche ce qui accélère ou spécialise — proprement.
Performances & montée en charge
Les bases no-code « façon tableur » (par ex. Airtable) rendent de fiers services pour un MVP. Mais elles montrent vite leurs limites quand plusieurs personnes travaillent en même temps, que les volumes augmentent, lors des pics d’activité (inventaires, clôtures) ou en reprise après incident. À ces limites fonctionnelles s’ajoutent des plafonds techniques documentés : l’API Airtable applique 5 requêtes/seconde par base (et d’autres quotas), ce qui impose une orchestration prudente et des files d’attente sur les flux.
Processus métier : éprouvés, donc rassurants
Au-delà de la technique, certaines routines ne s’improvisent pas :
- Comptabilité : clôtures, TVA, lettrages, journal d’audit, séparation des rôles.
- WMS (logistique) : réservations en ligne, lots/numéros de série, FEFO (First Expired, First Out), inventaires tournants, lecture code-barres.
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Fabrication / Qualité : MRP, traçabilité, contrôles, gestion des non-conformités.
Réécrire « à plat » tout cela en no-code, puis tenir la distance opérationnelle et réglementaire ? Très risqué.
Nos principes chez Auguria (pratique, pas idéologique)
1) ERP au centre — système de référence (source de vérité) pour ce qui doit faire foi : ventes, achats, stocks, facturation, comptabilité.
2) No-code en périphérie — là où il excelle : interfaces et interconnexions (API↔API, webhooks/notifications, messages), plus souple à maintenir et rapide à faire évoluer.
3) Outils spécialisés si le bénéfice est clair, connectés proprement — par exemple :
- paiement (Stripe, Adyen, Mollie),
- expédition (Sendcloud, Boxtal, Shippo),
- etc.
On garde l’ERP comme référentiel et on synchronise uniquement ce qui doit l’être.
4) Gouvernance & surveillance non négociables quand on mixe des outils :
- Contrats d’API (schémas versionnés, idempotence, gestion d’erreurs/rate-limits) ;
- Journalisation centralisée, alertes, traces d’exécution ;
-
Rôles et responsabilités clairs (RACI), revues régulières des flux.
Objectif : des intégrations prévisibles et observables, plutôt qu’un empilement d’automatismes fragiles.
Exemple concret (schéma mental en 6 étapes)
- Commande validée dans l’ERP → événement émis.
- No-code récupère l’événement et orchestration :
- Paiement chez un PSP (ex. Stripe) → retour d’état.
- Expédition chez l’agrégateur (ex. Sendcloud) → étiquette + suivi.
- Notifications (email/SMS) → client & équipe.
-
ERP met à jour stock / facture / écriture ; la boucle est bouclée.
Le cœur reste cohérent ; l’innovation vit en périphérie.
Et Odoo dans tout ça ?
Chez Auguria, nous recommandons Odoo comme socle ERP (ventes, achats, stocks, compta, POS, projets). Avec des partenaires, on branche ensuite les applications spécialisées et les workflows no-code qui apportent un vrai plus — en gardant des interfaces simples, documentées et surveillées. C’est notre manière d’honorer le bon sens d’antan tout en laissant de la place à l’agilité de demain.
En bref
- ERP au cœur pour la cohérence et la tenue des règles (ACID, idempotence, etc.).
- No-code autour pour aller vite et adapter l’interface sans bousculer le référentiel.
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Le tout modulaire, jamais monolithique, gouverné et observable.
C’est ainsi que l’on avance sereinement, sans perdre ni la tradition des bons processus, ni l’élan d’innovation.
Références utiles : définitions du no-code (JDN, Impli), propriétés ACID et SSOT (Wikipédia / Astera), FEFO en logistique (Mecalux), limites d’API Airtable (Airtable Support).